La Smart City donne naissance à de nouvelles mobilités. Aujourd’hui elles sont douces et électriques. Demain elles seront peut-être autonomes et aériennes. Cette multimodalité impose la mise en place d’outils et de plateformes qui favorisent une expérience plus fluide et plus libre. Pour Gareth Camp et Travis Kalanic, les fondateurs d’Uber, il doit toujours y avoir une solution de transport disponible pour le voyageur. Pas zéro, pas deux, Une. Toujours disponible. C’est la même logique qui alimente le MaaS.
J’explore plus en détails le sujet de cet article et celui des mobilités dans ma thèse professionnelle Voyage(s) : la convergence technologique pour réinventer l’expérience.
Qu’est-ce que le MaaS ?
Le MaaS – Mobility as a Service – rassemble les outils “as a service” qui permettent aux voyageurs d’accéder à une offre de transports devenue complexe et multimodale. Il n’agit pas sur l’offre en elle-même, mais sur la façon dont celle-ci est distribuée et valorisée.
Avec le MaaS, le parcours devient plus fluide, plus simple, et s’inscrit dans une logique de porte à porte. Les plateformes de distribution MaaS cherchent à améliorer et intégrer l’expérience client avant, pendant et après le voyage.
Des exemples d’applications MaaS
L’application CityMapper; par exemple, a un fonctionnement de type MaaS. Elle rassemble sur sa plateforme les données de parcours de l’ensemble des fournisseurs de transports d’une zone urbaine. En agrégeant les données, elle simplifie l’accès à l’information.
La ville d’Helsinki aussi a mis en place cette logique MaaS, en allant un cran plus loin. Son application Whym, développée avec la startup MaaS Global, propose l’itinéraire idéal en intégrant toutes les mobilités et accompagne le voyageur tout au long du parcours. On peut régler chacune des courses à l’unité, ou prendre un abonnement sans sortir de la plateforme. En appliquant cette méthode, Helsinki a augmenté la part modale des transports publics de 26 points,. Elle a ainsi répondre à un enjeu majeur de notre siècle, celui de transports plus responsables.
C’est officiel, @tierscooters rejoint #bonjourratp ! Les adeptes de trottinettes peuvent désormais rechercher, déverrouiller et payer leur bolide directement sur l’#app 📱 pic.twitter.com/iD8C3QTVIL
— RATP Smart Systems (@RATP_SmartSystM) October 11, 2021
Le MaaS, en phase avec les enjeux et les tendances
Selon l’ADEME, un français émet 9 tonnes de Co2 chaque année. L’objectif pour sauver le climat : diviser ce chiffre par deux d’ici 2030 et par 4 d’ici 2050. En offrant une expérience de voyage plus expérientielle, le MaaS doit permettre de réduire la part modale de la voiture individuelle dans les transports, favoriser les mobilités vertueuses et ainsi répondre à l’exigence environnementale.
Avec son application multimodale et son expérience de voyage d’une limpidité absolue, la compagnie nationale suisse CFF agit en ce sens. Les Suisses prennent en moyenne 71 fois le train chaque année, deux fois plus que n’importe quel autre pays en Europe. CFF participe aussi à la création d’une mobilité plus fluide et toute en un, alors que le parcours digital pour prendre les transports est souvent complexe et rempli de points de friction.

Dans une économie qui se transforme, des biens vers l’expérience, de la possession vers le service, le MaaS présente tous les atouts pour répondre aux enjeux. En France, la SNCF, par exemple, avance petit à petit vers cette logique. Elle vient d’annoncer le lancement pour Janvier 2022 de sa nouvelle application SNCF Connect, avec une logique multimodale intégrée, pour gérer “vos petits et grands trajets”.
Pour favoriser le développement du MaaS et éviter les positions dominantes, les collectivités peuvent mutualiser l’ensemble des API et rendre leur accès plus égalitaire. C’est le cas par exemple en île-de-France, avec île de France Mobilités, qui propose en outre sa propre plateforme de distribution.
Malgré les investissements actuels, aucun service en Europe n’atteint aujourd’hui le niveau d’intégration d’un Wechat en Chine. Reliée à l’écosystème du réseau social, la mini application Ride Code permet d’acheter et valider par QR code ses billets de transport en commun dans plus de 100 villes du pays. Elle annonçait déjà 100 millions d’utilisateurs en 2019.
Cette logique de service conduit nécessairement à digitaliser l’expérience, en faisant du smartphone l’assistant personnel du trajet. Elle permet d’activer un deuxième levier d’une stratégie MaaS, où l’intelligence artificielle et la personnalisation jouent un rôle prépondérant.
La technologie au service du MaaS
Pour les opérateurs de transport, le MaaS offre la possibilité d’ajouter des services additionnels à leur portefeuille et ainsi mieux accompagner les voyageurs porte à porte.
MaaS et Intelligence artificielle
Si on peut intégrer grâce à des APIs des offres de transports porte à porte, c’est qu’on est mesure d’ajouter également des services complémentaires, en se connectant aux API des startups ou en proposant ses propres options additionnelles. S’il pleut dans la ville d’arrivée, pourquoi ne pas proposer la réservation d’un taxi ? Si la personne voyage avec des enfants, pourquoi ne pas lui rappeler qu’il y a un espace de jeux dans la voiture 14, ou un service de garde à disposition ? S’il va manquer son transfert, pourquoi ne pas lui proposer un trajet de remplacement immédiatement ?
Le MaaS permet d’intégrer à l’offre du transporteur tous types de services personnalisés : voiturier en gare, transport de bagages (ou consigne), système de hop-of hop-on, activités, guide personnel. 83% des gens se disent prêts à partager leur donnée pour une expérience client plus personnalisée.
Mais on le sait en matière d’expérience utilisateur, less is more. Il ne s’agit en aucun cas de montrer toutes les offres de mobilité et tous les services additionnels à tous les voyageurs. Il s’agit d’être pertinent, et d’entrer dans une logique conversationnelle et expérientielle tout au long du parcours voyageur. La simplicité de l’expérience utilisateur est clé dans un monde de multi-modalité. Le service a donc besoin de connaître nos habitudes et nos intentions en exploitant à la fois les données froides et les données chaudes.
L’intelligence artificielle permet de filtrer les messages qui sont transmis, les services qui sont proposés. Elle permet de mieux cibler les attentes, non seulement en fonction du voyageur, mais aussi en fonction du contexte dans lequel il voyage. L’intelligence artificielle fluidifie l’expérience en la rendant unique pour chaque cible, et elle réduit la pression commerciale en ciblant les besoins pour proposer des services additionnels pertinents au bon moment.
Blockchain et smart contracts
Pour simplifier encore l’expérience du voyageur et la gestion en back office, la blockchain pourrait venir renforcer la logique MaaS dans quelques années.La clé : Le smart contract. Le smart contract est un produit de la blockchain, un contrat intelligent, qui permet la transmission d’un actif dès que les conditions prévues sont remplies. En d’autres termes, contrairement à un contrat traditionnel, qui s’exécute entre deux parties, un smart contract peut “voyager”.
Dans notre logique MaaS, il permettrait à une plateforme de proposer un seul billet pour un parcours multimodal, et même un seul billet pour une offre élargie avec des produits tiers, par exemple une offre de transport et de visite intégrée pour aller au Futuroscope. Avec les smart contracts, tout s’exécute facilement, et on simplifie encore l’expérience client.
Si tous les acteurs l’adoptent et qu’une autorité de régulation la structure, et qu’elle arrive à réduire considérablement son impact environnemental, la blockchain pourrait donc être à la base d’un MaaS 2.0 boostée par la logique des smart contracts.
Des challenges à relever pour le MaaS
Le concept de Mobility as a Service est source de grandes promesses : un voyage plus fluide, plus libre, plus expérientiel, plus responsable. Mais il présente aussi un nombre important de challenges à relever. Des investissements importants sont nécessaires pour sa mise en place. Les offres de différents opérateurs peuvent être difficiles à mettre en commun. Le MaaS doit adresser des profils différents, du trajet quotidien au voyage longue distance…Enfin, dans un monde multi-modal, et avec l’ajout de nouveaux services toujours plus personnalisés, les plateformes MaaS devront rester simples à utiliser, et faciles à comprendre pour l’utilisateur.